Je retrouve des bouts de souvenir partout où j'avais oublié que je les avais laissés. Ca grouille dans la maison, même dehors. Accrochés aux lampadaires de ma rue il y a des images qu'on ne voit pas.
On dirait qu'à chaque nouvelle couche d'existence, l'ancienne éclate sous le poids, et que les morceaux viennent se loger partout.
Je retombe sur des images et des sons, même des souvenirs de toucher pour moi qui n'ai jamais aimé la peau. Une bouteille de désinfectant planquée derrière les feuilles d'imprimante, du fil multicolore, un marque-page espagnol qu'on avait trouvé beau avec Julia. Des étiquettes avec des dessins fait main et des mots, pour apprendre à lire à Kévin, c'était son premier CP; "chat" écrit en capitale avec le dessin d'une chose non identifiée qui ressemble plus à un dinosaure qu'à un félin. Et des phrases écrites au hasard d'un bloc-note - je faisais ça, je choisissais une feuille perdue dans les autres, et je notais la phrase obsédante de la minute. On ne retombe dessus que quand on les a totalement oubliées - et on ne peut que constater que l'écriture est la même, un peu moins tordue peut-être.
Gommez.
J'ai envie de faire sauter une bombe atomique dans tous les lieux où j'ai posé le pied, une arme chimique remplie d'alcool à 90. Les grands ménages n'y pourraient rien, ils laisseraient les murs intacts avec tous les souvenirs écrasés dessus.
C'est faux, nous n'avons jamais perdu le contrôle.
Mais ça a l'air assez réel quand même.
