Non, arrêtez, j'étouffe, je ne peux plus, de l'air, de l'air. Enlevez vos sales pattes de mon cou, vos doigts au fond de ma gorge me font vomir. Je ne veux plus de moquette et plus de caniches morts, c'est drôle comme le verbe sauver peut vouloir dire "sauver quelqu'un" et "se sauver"-partir, mais moi je ne veux plus de ça, si je ne veux plus rien c'est que je veux tout, arrêtez avec vos abrutissements à faire, tu feras mais moi je ferai tard et seulement quand ma mauvaise humeur ridicule sera passée, je ferai au dernier moment et j'aurai le droit de bâcler, de râturer, de préférer le blanc.
Allez petits coeurs écrabouillés et alignés en rang, je ne veux plus de vous dans ma poitrine, d'ailleurs je ne veux rien dans ma poitrine, ventilez-moi l'intérieur, que l'air circule à l'intérieur, je n'ai pas de date de péremption, je ne suis pas destinée à la pourriture, je ne me contamine pas moi-même.
Mes ongles sont trop longs et trop blancs, chacun de leur millimètres contruit un pont vers la mort - vas-y que je te les ronge, si je pouvais je les arracherai, je libèrerai le bout de mes doigts, après tout un membre séparé de l'étau n'est pas un moignon.
Non, rien, ça va passer, je suis irresponsable. Pas étonnant que je sois tout le temps en train de bouger mes orteils dans mes chaussures. Petits grognements de rien du tout qui se fichent dans les dents, et un jour j'ouvrirai les tripes de mon édredon pour lui faire sentir l'air, tu m'entends édredon débile et mou, l'air pur de l'hiver dans tes quartiers en relents. Edredon tu mourras en respirant, pour pallier mon asphxie.
Imagine si on dégueulait à chaque expiration.
Ce n'est pas vrai, je ne suis pas une machine, j'aime me cultiver, j'aime me cultiver sur des choses que j'aime, j'aime perdre mon temps, j'aime rentrer tard, j'aime dormir peu, j'aime rentrer peu et dormir tard.
Oui, je sais, c'est un petit sursaut débile et je retournerai bientôt gribouiller pour m'apprendre à gribouiller encore plus, un peu honteuse et beaucoup rien du tout.
Tout ce qui n'est pas inaltérable me dégoûte. Je me dégoûte de ne pas être inaltérable, de ne pas faire des choix encore plus radicaux et de les tenir jusqu'à l'horreur. Un jour il faudra que ma tête explose quand elle touchera le mur, comme si j'avais depuis toujours une bombe atomique à la place du crâne. Au lieu de ça, la seule chose que j'ai jamais réussi à faire, c'est une petite cicatrice mauve au-dessus du sourcil gauche, en forme de bris de verre, et qu'on pourrait reboucher en quelques secondes si j'étais une statue de glaise.
J'ai voulu rendre ce joueb neutre mais ce n'est qu'une image en papier calque, posée sur mon visage par-dessus toutes les autres.
En attendant, allez, hop, rer.
Je file moi.
